La diphyllobothriose

Agent causal

Diphyllobothrium latum est un ver plat rubané (classe des Cestodes, ordre des Diphyllobothriidea, famille des Diphyllobothriidae) d’une dizaine de mètres qui peut vivre plusieurs années (Fig.1). Il est responsable d’une infection parasitaire digestive appelée la diphyllobothriose.

Figure 1. Diphyllobothrium latum ou ténia du poisson, ver adulte.

Cycle Biologique

Le cycle biologique (Fig. 2) du parasite comprend un hôte définitif : l’homme (et d’autres mammifères piscivores) et au moins deux hôtes intermédiaires : un crustacé planctonique et un ou des poissons d’eau douce. Lors de conditions environnementales favorables, les oeufs émis dans les eaux douces avec les matières fécales de l’hôte définitif terminent leur maturation en 8 à 12 jours puis éclosent et libèrent un embryon cilié. Celui-ci est ingéré par un crustacé microscopique du genre Cyclops ou Eudiaptomus et se transforme en larve procercoïde au sein de la cavité générale. Lorsqu’un poisson carnivore ingère ce crustacé planctonique, cette larve se transforme en un second type de larve dite plérocercoïde, longue de quelques millimètres (Fig. 3). Celle-ci s’enkyste dans la musculature ou les viscères du poisson. L’homme et d’autres mammifères piscivores se contaminent alors, en ingérant la chair crue ou insuffisamment cuite de ces poissons d’eau douce. Une fois dans l’intestin de l’hôte définitif, la larve plérocercoïde grandit de plusieurs centimètres par jour et les premiers oeufs sont émis avec les selles, environ un mois après l’infestation. Il existe plusieurs espèces de ce parasite, pathogènes pour l’homme, mais seule l’espèce D. latum peut être contractée à partir de poissons d’eau douce métropolitains. Cependant, des cas de diphyllobothriose à D. nihonkaiense (espèce du Pacifique) ont été observés chez des consommateurs de saumons (Onchorynchus sp.) importés du Pacifique (Canada).

Figure 2. Cycle de vie de Diphyllobothrium latum.

Prévalence

La diphyllobothriose est toujours présente en Europe occidentale. Elle est en décroissance dans les pays baltes ou scandinaves qui constituaient les foyers historiques de la parasitose. Par contre, elle semble être en émergence dans les zones francophones et italophones des lacs périalpins où une pêche professionnelle existe souvent. Depuis 1987, plus de 200 cas ont été signalés ou publiés autour des lacs Léman, de Morat, de Bienne, Majeur, de Côme, d’Iseo et de Garde. Le lac Léman semble particulièrement touché puisque 48 cas de contamination ont été identifiés sur ses bassins versants suisses et français en 2001 et 2002. Entre 2002 et 2007, 44 cas ont été identifiés dans les laboratoires d’analyse médicale de Haute-Savoie. Les aliments impliqués sont la chair crue (filets marinés, carpaccio, etc.) ou les oeufs crus de poissons d’eau douce : perche (Perca fluviatilis), brochet (Esox lucius), omble chevalier (Salvelinus alpinus), lotte (Lota lota), etc. 4 à 10 % des filets de perches consommés sur les bords du lac Léman sont porteurs du parasite. Les corégonidés (féras) et probablement, les salmonidés européens du genre Salmo sont réfractaires à D. latum. Les salmonidés canadiens du genre Onchorynchus peuvent héberger des larves de D. nihonkaiense.

 

Figure 3. Une larve plérocercoïde de Diphyllobothrium latum dans un filet de poisson.

Signes cliniques

Le parasitisme se manifeste par des douleurs abdominales et l'émission d'anneaux ressemblant à ceux du ténia. Des anémies par carence en vitamine B12 ont été décrites en cas d’infestation prolongée chez des populations dénutries.

Prévention

La prévention repose sur une cuisson suffisante du poisson (65°C)  ou sur sa congélation à - 20°C pendant 8 à 72 heures selon l’épaisseur du poisson. En matière d’hygiène collective, un traitement des eaux usées dans des stations d’épuration modernes est susceptible d’interrompre le cycle de transmission.

Références

Dupouy-Camet J,Haidar M, Espinat L, Dei-Cas E, YéraH, Ben MostafaA, Guillard J, Aliouat-Denis CM. 2014. Prévalence de l’infestation par Diphyllobothrium latum de différents poissons des lac Léman, du Bourget et d’Annecy et évaluation de l’incidence des cas humains auprès des laboratoires d’analyse médicale de la région (2011-2013). Bulletin épidémiologique de l’ANSES. Santé animale et alimentation. Sous presse.

Dupouy-Camet J & Peduzzi R. 2004. Current situation of human diphyllobothriasis in Europe. Euro Surveillance, 5:31-35. Version originale anglaise. Résumé en français.

Nicoulaud J, Yéra H & Dupouy-Camet J. 2005. Prévalence de l'infestation par Diphyllobothrium latum, L., 1758 chez les perches (Perca fluviatilis) du lac Léman. Parasite, 12(4):362-4.

Yéra H, Estran C, Delaunay P, Gari-Toussaint M, Dupouy-Camet J, Marty P. 2006. Putative Diphyllobothrium nihonkaiense acquired from a Pacific salmon (Oncorhynchus keta) eaten in France; genomic identification and case report. Parasitol Int, 55(1):45-9.

Von Bonsdorff B. 1977. Diphyllobothriasis in man. Editions Academic Press, Londres.

Wicht B, Peduzzi R & Dupouy-Camet J. 2010. Diphyllobothriose. In: Actualités permanentes en bactériologie clinique, vol. IX, Editions ESKA, Paris.

Liens utiles

CDC

FAO/OMS

Reportage de la Télévision Suisse Romande, sur le risque de manger des poissons crus

Fiche ANSES sur Diphyllobothtrium

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